1946 - 1947
La création des deux associations confessionnelles mélanésiennes :
L’UICALO et l’AICLF
L’Union des Indigènes Calédoniens Amis de la Liberté dans l’Ordre (UICALO) et l’Association des Indigènes Calédoniens et Loyaltiens Français (AICLF) respectivement d’obédience catholique et protestante sont exclusivement mélanésiennes, statutairement apolitiques et à caractère confessionnel. Elles ont été créées en 1947 par le Père Luneau et le Pasteur Bénignus. Leur objectif avait un double caractère : officiel, par l’accompagnement et l’encadrement de la masse autochtone au moment de la mise en place d’un cadre juridique et politique libérateurs; officieux, en faisant barrage aux idées communistes véhiculées par Jeanne Tunica y Casas, l’égérie du parti communiste calédonien qui commence à rallier à sa cause de plus en plus de Mélanésiens en soutenant énergiquement leur émancipation politique et sociale.
Au sein de ces deux structures, une intense réflexion sur la nécessaire évolution de la condition mélanésienne se fait jour. De nombreuses publications internes et des prises de positions durant les conférences annuelles en témoignent. Le monde mélanésien est en pleine effervescence. Des revendications grandissantes et de profondes réformes intéressant directement la collectivité autochtone sont annoncées dans des programmes aux accents parfois politiques comme l’inviolabilité des réserves, l’amélioration de l’instruction scolaire, l’égalité des conditions de travail et de solde, l’interdiction de la vente d’alcool dans les tribus, l’établissement légal d’un statut indigène évolué ou encore une représentation indigène auprès de l’administration. Au fur et à mesure de leur développement, l’Union et l’Association se structurent à la base, dans chaque tribu, désignant des délégués, rassemblant leurs membres dans des réunions locales, régionales puis générales, portant à leur tête des personnalités reconnues et respectées (Rock Pidjot pour l’UICALO, Kowi Bouillant pour l’AICLF). Leur audience prend une envergure territoriale. En 1948, elles rassemblent 15 000 membres soit la presque totalité des adultes mélanésiens de l’époque. Ils vont jouer un rôle primordial lors de l’élection législative de 1951 puisque le candidat sur lequel porteront leurs suffrages est presque assuré de l’emporter.
L'Union des Indigènes Calédoniens Amis de la Liberté dans l'Ordre
La réunion des Mélanésiens de confession catholique dans une association – UICALO – à l’initiative du vicariat apostolique de Nouvelle-Calédonie, est une étape importante du réveil politique de la population mélanésienne après la Seconde Guerre mondiale en Nouvelle-Calédonie. En fait, la forme la plus achevée de ce réveil. De 1946 à 1953, on assiste à l’émergence et l’établissement d’un mouvement dont la réalisation est à mettre, pour le principal, au crédit des missionnaires, des catéchistes et des notables.
Le programme de l'UICALO
• Constituer “partout des comités de résistance à l’erreur la plus néfaste (le Parti Communiste) que le monde ait vu jusqu’ici”.
• Revendications pour l’obtention de libertés publiques : maintien en l’état du statut des réserves, abolition des réquisitions et des prestations, allègement de l’impôt de capitation, répression de l’alcoolisme, établissement de contrats de travail réguliers, rédaction d’un “statut indigène évolué”, création d’un “corps d’agents de police indigènes assermentés”, élection de représentants indigènes qualifiés pour soutenir auprès de l’administration “nos droits et nos intérêts”.
• Rénover le statut indigène.
• Démocratiser et moderniser l’organisation traditionnelle du gouvernement de la tribu et des districts.
L'Association des Indigènes Calédoniens et Loyaltiens français
Comme la mission catholique, l’Église protestante en Nouvelle-Calédonie lance, au milieu de l’année 1946, la création d’un mouvement capable d’organiser l’expression de la revendication mélanésienne dans le cadre de la nouvelle politique indigène du pouvoir central. Cette initiative est aussi une manière d’empêcher le Parti Communiste de s’implanter dans les tribus. Enfin, la création de l’AICLF coïncide avec un renouveau certain de l’Église protestante proprement dite.
Le programme de l'AICLF
• L’unité du peuple mélanésien de Nouvelle-Calédonie,
• Le maintien des réserves, mais dotées de structures d’encadrement modernisés,
• Le renforcement de la cellule familiale,
• Le développement social des tribus,
• La participation aux affaires publiques,
• L’entraide familiale et sociale et le travail productif,
• L’amélioration des conditions de travail des salariés,
• Le partenariat avec la France et la haute-administration.